jeudi 15 mars 2012

Témoignage

On m’a demandé de témoigner de mon expérience, mais comment bien expliquer tout ce que je vis ici! L’analyser me prendra peut-être toute ma vie. J’avais tant d’attentes, mais j’ai eu finalement tant de surprises. Ma première fut ma fragilité, moi qui me croyais invincible. Pourtant, il n’a suffi que de me séparer de mon groupe dans cet environnement si différent du mien pour me faire vivre un choc qui m’a complètement bouleversé. Comment croire que ces douze heures de vol aérien ne nous ait pas amené sur une autre planète, ou du moins dans une autre époque. Ici, partager n’est même plus apprécié, c’est la normalité. Ici, pour une importante fête religieuse, ma famille pourtant catholique a préparé un mets typique pour des enfants musulmans. Ici les gens disent bonjour à tous ceux qu’ils croisent, même sans les connaître. Mon entrée dans le monde de 22 orphelins, mon milieu de stage, m’a également bouleversé. J’avais les larmes aux yeux, je n’arrivais pas à comprendre comment ils pouvaient être autant joyeux et polis. Leur sourire et leur gentillesse resteront gravés dans ma mémoire à tout jamais. Ces enfants sont arrivés pour la plupart avec le ventre gonflé par la malnutrition, sans aucun espoir d’avenir devant eux. Ils partent maintenant tous les matins à l’école, bien nourris en quantité et en qualité. Bien sûr, ils ne posséderont aucun coffre de jouets, mais ils ont une aide aux devoirs et un lit pour dormir. Je croyais que ce que je pourrais leur apporter de mieux était des jouets, des livres. Je m’étais trompée. Ce que les enfants ont réellement besoin est de l’attention. C’est ce que je leur ai donné et j’ai reçu en retour une véritable leçon de vie. Seulement en les écoutant et les regardant, j’ai eu l’impression de faire l’action la plus significative de toute ma vie. L’Afrique m’aura permis de mieux me connaître en me faisant traverser de rudes épreuves, mais la plus dure demeure à venir. Après m’être attachée à ma nouvelle famille et aux enfants, je dois maintenant les quitter.

Marie-Pier Fortin-Dufour

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